Traversée Corse-Île d'Elbe oui mais pas avec le Bruline ! Avec le Régiment du Génie d'Assaut Colonial de la 9° DIC !
Respect !
LE DÉBARQUEMENT A L?ILE D?ELBE VU PAR LE CAPORAL RENÉ JACQUET
Débarquement des Troupes d?Assaut de la 1ére Armée Française
17/06/1944
Le 17 juin 1944, à l?aube, une flotte d?une bonne centaine de bateaux approche de l?île d?Elbe, l?île ou Napoléon resta 300 jours en exil en 1814.
Le temps est calme ; la brise nous caresse le visage. Nous sommes heureux après être resté enfermés pendant 24 h avant le départ ; ne pas se faire repérer par l?aviation d?observation ennemie est essentiel. Nous sommes partis de Porto-Vecchio (Sud-est Corse), d?autres de Bastia (Nord-est Corse).
La première opération amphibie de l?armée française va se déclencher.
Une première vague de Débarquement au Nord près de Porto-Ferraio, la deuxième au sud à Marina di Campo (nous sommes détachés au 13° RTS).
Je fais partie de la dernière. Nous approchons de la baie. L?Île d?Elbe est cachée dans la brume, j?admire le superbe convoi de navires qui nous me suit.
Soudaine je sursaute, terriblement surpris, un bruit terrible vient de retentir. Un officier me demande : « Qu?est ce qui t?arrive ? » Je réponds « Qu?est ce qui se passe ? » « C?est tout simplement un obus » « Ah ! Bien ? » mais c?est mon premier obus.
La fête commence---Oh---diable
Nos bateaux Rocket Gun déversent sur la plage longue de 4 à 5 kms des milliers d?obus afin de faire exploser les mines qui l?infectent.
Le bataillon de choc et le commando français attaquèrent directement dans la montagne afin d?éliminer les casemates et les blockhaus de leurs occupants qui commencèrent à expédier subitement un déluge d?obus et de mitraille à l?arrivée des premiers bateaux de débarquement LCT et LCA dans la baie de Marina Di Campo.
Les pièces d?artillerie de la montagne (San Piero) surplombant la rade firent rapidement mouche sur les deux bateaux précédents le mien qui prirent feu. Le mien fit demi-tour entouré d?obus dont les éclats rejaillissaient de toutes parts sur le pont. Je me filais sous un GMC chargé d?explosifs et m?amusai à regrouper les éclats brulants.
J?admirai dans son kiosque, le commandant anglais flegmatique, mais 4 fois nous dûmes rebrousser chemin tant l?approche de la plage était difficile.
Enfin, nous débarquâmes, de l?eau jusqu?au ventre, les bras en l?air pour ne pas mouiller les armes. Les tirs d?obus et le mitraillage s?amoindrissaient et je retrouvai sur la plage mon copain Robert Lapille de la Léègion, qui était un rigolo, en petit caleçon court. Je me mis à rire et lui demandai : « Qu?est ce que tu fous à poils ? » « Je suis en vacances et je me baigne ». IL avait été obligé de se foutre à la flotte et ça chauffait, se trouvant sur l?un des bateaux en flamme. Mais à la guerre, dans les pires moments, l?humour ne perd jamais ses droits.
Déjà la plage était nettoyée de ses mines. Nous rentrâmes dans Marina Di Campo, me trouvai avec un commando anglais à fouiller les maisons. Nous nous sommes vu sans nous regarder, occupés à la recherche des tireurs isolés et cachés. Un cadavre allemand tout nu, se trouvait à nos pieds dans une chambre. Il avait été surpris à son lever et ne s?en est jamais remis.
Le combat allait continuer 51 h dans l?ensemble de l?île, mais soudain un drapeau français apparu dans la montagne de San Pierro. Bataillon de choc et commando avaient nettoyé la montagne de ses occupants teutons.
Pendant ce temps là, un patrouilleur allemand se trouvant dans le port (cote ouest) est pris à l?abordage par le commando anglais. Le commandant allemand a attendu qu?un nombre important de commando soit sur le bateau afin de le faire sauter. Un amas de cadavre anglais jonchait le port coté ouest.
Nous apprenons par les prisonniers que les soldats allemands ignoraient le débarquement allié en Normandie ; ce qui peut expliquer l?acharnement de la défense ennemie.
Cela n?était que le début d?une dizaine d?attaques et offensives qui allaient nous mener au Rhin et Danube pendant un an.
René Jacquest
Groupe Débarquement de Plage du 71° Génie de la 9° DIC.
Au cours de ce débarquement, je perdis 5 de mes camarades :
+ Sergent Chef Fabre : balle au c?ur
+ Cardot et Verettout : ont sauté lors d?opération de déminage
+ Alfred Ross, mon bon copain dOran : balle dans la tête
+ L?aspirant Jean Froment qui a créé la chanson de la 9° DIC « Nous rentrerons tous en France » . Lui n?est pas rentré. Nous avions chois notre destin : Mourir ou rentrer en France.
Embarque sur Bruline, le diable rit avec nous ...