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<<<<Le DPM depuis l'époque romaine
(Extraits résumés; Source : ' DROIT DU LITTORAL ' de Norbert CALDERARO, édit. : Le Moniteur - Collection l'Actualité Juridique)
Sur ordre de l'empereur romain d'Orient JUSTINIEN, les Institutes, élaborées en 553 après J.-C. précisent notamment (livre II, titre I, paragraphe 3) : ' Est autem litus maris, quatenus hibernus fluctus maximum excurrit ' (Le rivage de la mer s'étend jusqu'à l'endroit où arrive le plus grand flot de l'hiver).
Au Moyen Âge, des rivages de la mer devinrent, au moins théoriquement, la propriété du monarque.
La monarchie, alertée par les réclamations de riverains, rétablit son droit sur cette partie importante du domaine de la Couronne dont l'édit du 30 juin 1539 de François 1er avait consacré l'inaliénabilité et l'imprescriptibilité.
Une ordonnance enregistrée le 10 mars 1544 au Parlement de Paris intègre officiellement les rivages de la mer dans le domaine de la couronne.
L'édit de février 1566 (dit édit de Moulins) crée véritablement le domaine public en France et confirme son caractère inaliénable.
Pendant la période révolutionnaire, la domanialité des rivages est de nouveau remise en cause à l'occasion de la vente des biens nationaux. Mais, dans le même temps, la loi des 22 novembre et 1er décembre 1790 incorpore les rivages, les rades, les havres et les ports dans le domaine public.
Au début du XIX siècle, le Code civil dispose dans son article 538 : ' Les rivages, lais et relais de la mer, les ports, les havres, les rades [?] qui ne sont pas susceptibles d'une propriété privée, sont considérés comme des dépendances du domaine public.
La jurisprudence considère traditionnellement que les rivages de la mer, c'est-à-dire la partie du rivage que la mer couvre et découvre entre ses plus hautes et plus basses eaux, font partie du domaine public (CE 30 avril 1883, Bourgeois, Leb. P. 405 ; Cass. Civ. 7 juillet 1869, S. 1869 I. 410).
Les dispositions aujourd'hui applicables sont l'ordonnance de 1681, l'article 538 du Code civil et la loi du 28 novembre 1963.
En 1973 l'arrêt Kreitmann clarifie la détermination du domaine public maritime.
Les terrains que des ouvrages ont pu, avant 1963, soustraire au plus haut flot, mais dans le seul cadre d'autorisations d'occupation précaires et révocables relèvent toujours du domaine public (CE 5 novembre 1975, Epoux Govys, Leb. P. 541).
Nous avons maintenant la loi n° 86 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral.
Arrêt KREITMANN
II ? La clarification opérée par l'arrêt Kreitmann
L'arrêt d'Assemblée du Conseil d'État du 12 octobre 1973 (Leb. p. 563 ; AJDA 1973p 586, chron. Franc et Boyon ; RDP 1973 p. 1150, concl. Michel Gentot ; D. 1975p 164', note Distel ; CJEG 1974 p. 21, note Pleven), ainsi que la Section des travaux publics l'avait suggéré dans un avis du 27 décembre 1955, a mis un terme à l'appli-cation des vénérables textes du droit romain et a donné de l'ordonnance de 1681 une interprétation plus conforme au régime réel des marées.
Cet arrêt capital précise que les dispositions précitées de l'ordonnance de Colbert « doivent être entendues comme fixant la limite du domaine public maritime, quelque soit le rivage, au point jusqu'où les plus hautes mers peuvent s'étendre, en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles ».
C'est ainsi « la laisse de haute mer » - qui correspond au point atteint par le plus haut flot sur le rivage - qui détermine sur la terre ferme, et pour toutes les côtes, la limite du domaine public maritime, sans qu'il y ait lieu de faire référence à une quelconque période de l'année.
La notion de plus haut flot exclut toutefois les tempêtes exceptionnelles.
Déjà en 1776 René-Josué Valin, commentant un arrêt du Parlement d'Aix-en-Provence du 11 mai 1742 (Nouveau Commentaire sur l'ordonnance de la marine, ouvrage précité, p. 572), relevait : « Mais, par rapport au rivage, il ne faut entendre que la partie jusqu'où s'étend ordinairement le grand flot de mars, laquelle partieest facile à reconnaître par le gravier qui y est déposé, et nullement l'espace où parvient quelquefois l'eau de la mer, par les coups de vent forcés, causes et suites, toutà la fois, des ouragans et des tempêtes. Arrêt d'Aix du 11 mai 1742, prononcé par M. de Raguse, suivant les conclusions de M. Castillon, entre les frères Jourdan de Cannes et le procureur du Roi de l'amirauté d'Antibes, d'une part ; les frères Mus, dudit lieu de Cannes, d'autre part. »
Le Conseil d'État, reprenant une jurisprudence ancienne (CE 29 juillet 1898, Commune de Mudaison, Leb. p. 621 ; D. 1899 III 111, pour la Méditerranée - CE 10 mars 1882 Duval Leb. p. 245, concl. Le Vavasseur de Précourt pour les autres rivages, confirmée par CE 1' octobre 1971, Société nouvelle foncière du Cap-Ferret, Leb. p 576 ; RDP 1972 p. 668, note Waline), prend le soin de préciser que cette limite peut être constatée lors d'une tempête violente, mais non pas au cours d'une tempête exceptionnelle (CE 18 juin 1976, Ménard et dame Pujol, Leb. p. 322, concl.Genevois - CE 30 juin 1982, Société civile du Platin de la Jeune Prise, Leb. T. p. 617 ; Dr. adm. 1982 n° 299).
Conformément à la jurisprudence antérieure, le Conseil d'État écarte donc la prise en compte de marées dont la force serait due à des perturbations météorologiques exceptionnelles, ce qui revient à s'attacher au critère des plus grandes marées (ou des plus hautes mers en Méditerranée) annuelles habituellement constatées.
L'interprétation extensive de l'ordonnance de Colbert donnée par l'arrêt Kreitmann il sert désormais de référence au juge administratif (CE 9 avril 1975, Arnaud, Leb T. p 1341 ; Dr. adm. 1975 n° 160 - CE 5 novembre 1975, Govys, Leb. p. 541 ; Dr adm 1975 n° 4098 - CE 18 juin 1976, Ménard et Pujol, Leb. p. 322, concl. Genevois - CE 29 novembre 1978, Salle, Leb. p. 479 - CE 9 mars 1984, Ministère duBudget/Compagnie des Salins de l'Est, Leb. p. 95 ; Les Petites Affiches 23 novembre 1984, p. 12, concl. Jeanneney - CE 6 mars 1987, Louer, req. n° 76445).
Ainsi un rocher environné par le plus haut flot de la mer à Six-Fours-les-Plages (Var) fait partie du domaine public maritime (CE 11 mai 1983, Ryckelynck, RDP 1984 p.1704).
Pour déterminer si un terrain situé en bord de mer est recouvert par le plus haut flot et fait donc partie du domaine public maritime, le juge administratif se réfère a des éléments très divers. Ainsi, pour refuser de classer certaines parcelles dans le domaine public maritime, le Conseil d'État a relevé dans une espèce, du 26)um 1985 Association trinitaine de défense de la pêche à pied et de l'environnement(Leb 'p 207 ? AJDA 1985 II p. 748, note J.C. ; RFDA 1986 p. 40, concl. Denoix de Saint-Marc ; Quot. jur. 7 décembre 1985 p. 2, note Moderne), qu'il ressortait de la description des lieux par des pièces remontant au xvui6 siècle, d'une part, que plusieurs de ces parcelles étaient déjà utilisées à cette époque pour le pacage des animaux et que des chemins y étaient tracés et, d'autre part, que toutes ces parcelles figuraient avec un numéro d'ordre au cadastre de 1830, sous l'appellation de salines d'étangs ou de marais, et qu'elles avaient fait l'objet dans le courant du XIXe siècle d'une suite ininterrompue d'actes translatifs de propriété entre personnes privées.
A l'inverse pour reconnaître un caractère domanial à la parcelle litigieuse, le juge se borne à reconnaître qu'elle est recouverte par les plus hautes mers en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles (CE 27 juillet 1988, Bellay Leb. p. 301).
Dans les départements d'outre-mer, l'application de l'ordonnance sur la marine de 1681 était admise par la jurisprudence bien avant l'arrêt Kreitmann (CE 31 janvier 1968, Plissoneau-Duquesne, Leb. p. 78 notamment) et fut naturellement confirmée après celui-ci (CE 7 novembre 1980, Pajaniandy, Leb. p. 413).
Mais l'exclusion des tempêtes et des ouragans pose certains problème particuliers. Ces départements sont en effet situés dans des régions tropicales où sévissent les cyclones, ainsi que, plus rarement, les raz de marée provoqués par des éruptions volcaniques ou des tremblements de terre. Par ailleurs, sur les côtes ouest de la Martinique et de la Guadeloupe, riveraines de la mer des Caraïbes, et sur tout le pourtour de la Réunion, les marées journalières sont d'une très faible amplitude et peuvent se comparer à celles de la Méditerranée.
La jurisprudence traditionnellement refuse de prendre en compte les cyclones, qui revêtent pour le Conseil d'État « le caractère d'un événement de force majeure » (CE11 juillet 1923, Malgoire/Colonie de la Réunion, Leb. p. 561 ; dans cette espèce, le cyclone en cause avait entraîné la destruction d'un immeuble) - cf. aussi TA Fort-de-France 29 novembre 1980, Préfet de la Martinique/Société Ham Holland.yCP 1981 II 19653).
Ainsi, les cyclones, comme d'ailleurs les raz de marée, n'ont pas le caractère de perturbations météorologiques exceptionnelles (TA Saint-Denis de la Réunion 13 janvier 1982, Préfet de la Réunion/Dame Giorgi, AJDA 1982 p. 260).
Le même jugement, s'il écarte aussi les marées journalières peu appréciables pour délimiter le domaine public maritime, retient néanmoins les grandes houles australes qui déferlent régulièrement, soit environ une dizaine de fois par an, sur le rivage réunionnais.
II est permis de regretter que la jurisprudence Kreitmann n'ait pas encore fait l'objet d'une consécration législative, assurant le « toilettage » indispensable de l'ordonnance de Colbert de 1681.
La loi du 3 janvier 1986, relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, si elle évoque les procédures de délimitation et la destination du domaine public maritime, ignore la question, simplement évoquée par une proposition de loi de Raymond Marcellin (Doc. AN 2e session ordinaire 1985-1986 n'132 - Rapport de la commission des Lois par M. Mazeaud, Doc. AN 2e session ordinaire 1987n°887). >>>>